La cause en bref
R. c. Chouhan
- La décision
- Jugement rendu : le 7 octobre 2020
- Motifs écrits publiés : le 25 juin 2021
- Référence neutre : 2021 CSC 26
- Décompte de la décision :
- Majorité : les juges Michael J. Moldaver et Russell Brown ont conclu que les modifications apportées au Code criminel afin d’abolir les récusations péremptoires sont constitutionnelles, et ils ont rejeté l’appel incident de M. Chouhan. Ils ont également conclu que ces modifications sont applicables aux processus de sélection des jurés entrepris à compter du 19 septembre 2019, et ils ont accueilli l’appel de la Couronne (avec l’accord du juge en chef Wagner et des juges, Karakatsanis, Rowe, Martin et Kasirer)
- Dissidence partielle : la juge Rosalie Silberman Abella a conclu que les modifications sont constitutionnelles, mais qu’elles n’auraient pas dû s’appliquer au procès de M. Chouhan parce que, selon elle, ces modifications avaient porté atteinte aux droits substantiels garantis à ce dernier par la Charte, et qu’elles auraient par conséquent dû s’appliquer aux procès futurs plutôt qu’à ceux en cours. Elle aurait rejeté tant l’appel de la Couronne que l’appel incident de M. Chouhan
- Dissidence : la juge Suzanne Côté a conclu que les modifications contreviennent à la Charte et sont inconstitutionnelles. Tout comme la juge Abella, elle était d’avis que les modifications ne devaient pas s’appliquer aux procès en cours. Elle aurait rejeté l’appel de la Couronne et accueilli l’appel incident de M. Chouhan.
- En appel de la Cour d’appel de l'Ontario
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Les modifications apportées au processus de sélection des jurés prévu par le Code criminel sont constitutionnelles, juge la Cour suprême.
Cette décision a des conséquences importantes sur le processus de sélection des jurés. La Cour suprême devait décider si les modifications qui ont été apportées au Code criminel sont constitutionnelles. Les modifications en question ont aboli la pratique de longue date qui permettait à la Couronne (la poursuite) et aux personnes accusées d’exclure un certain nombre de candidats jurés sans avoir à expliquer pourquoi. Cette façon de rejeter un candidat juré était appelée « récusation péremptoire ». Le Code criminel autorise encore les « récusations motivées », procédure qui permet d’exclure des candidats jurés pour certaines raisons précises.
La décision du Parlement d’abolir les récusations péremptoires vise à remédier à la discrimination dans le processus de sélection des jurés. Lorsque les modifications proposées ont été présentées au Parlement, la ministre de la Justice a déclaré que les récusations péremptoires donnent tant aux accusés qu’à la Couronne la capacité d’exclure un juré sans avoir à se justifier, et que, dans la pratique, « cela peut être utilisé de façon discriminatoire afin d’en arriver à une composition particulière du jury, et cela s’est fait. »
Les modifications législatives éliminant les récusations péremptoires sont entrées en vigueur le 19 septembre 2019, soit le jour même jour où a commencé la sélection du jury dans le procès de M. Pardeep Singh Chouhan pour meurtre au premier degré. Avant que son procès ne débute, M. Chouhan a contesté l’abolition des récusations péremptoires, affirmant que cette mesure était inconstitutionnelle et que, même si elle était constitutionnelle, elle ne devait pas s’appliquer à son procès. Il a prétendu que l’abolition des récusations péremptoires violait le droit à un procès devant un jury indépendant et impartial qui lui est garanti par les alinéas 11d) et 11f) de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte). Toutefois, le juge du procès a conclu que l’abolition des récusations péremptoires était constitutionnelle. La sélection du jury s’est donc déroulée sans ces récusations, et M. Chouhan a en définitive été déclaré coupable de meurtre au premier degré.
Monsieur Chouhan a fait appel de cette décision devant la Cour d’appel de l’Ontario. Celle-ci a statué que les modifications apportées au Code criminel étaient constitutionnelles, mais que certaines d’entre elles n’auraient pas dû s’appliquer aux procès avec jury qui étaient en cours au moment de leur entrée en vigueur. La Cour d’appel de l’Ontario a annulé la déclaration de culpabilité prononcée contre M. Chouhan et a ordonné la tenue d’un nouveau procès.
La Couronne a interjeté appel devant la Cour suprême du Canada, affirmant que les récusations péremptoires devaient être considérées comme abolies à l’égard de toutes les procédures de sélection du jury entreprises à compter du 19 septembre 2019, et qu’en conséquence M. Chouhan n’avait pas droit à ces récusations. Monsieur Chouhan a lui aussi fait appel à la Cour suprême, plaidant, comme il l’avait fait devant la Cour d’appel de l’Ontario, que l’abolition des récusations péremptoires était inconstitutionnelle.
L’abolition des récusations péremptoires est constitutionnelle
Les juges majoritaires de la Cour suprême ont dit qu’il fallait examiner la constitutionnalité du processus de sélection des jurés dans son ensemble. Ils ont considéré le processus tel qu’il existe maintenant, compte tenu des modifications apportées à celui-ci par le Parlement lorsqu’il a présenté les mesures législatives qui ont mené à l’abolition des récusations péremptoires.
Les juges de la majorité ont déclaré que le processus de sélection des jurés continue de garantir à chaque accusé le droit à un procès équitable devant un jury indépendant et impartial.
Ils ont précisé que les mesures de protection qu’offre le processus entrent en jeu bien avant que l’accusé ne comparaisse en salle d’audience pour sélectionner les jurés. À cet égard, ils ont souligné que les autorités provinciales sont constamment à l’œuvre pour dresser une liste représentative de jurés admissibles, dans le cadre d’un processus offrant à un large échantillon de la société une possibilité honnête d’exercer la fonction de juré.
Les juges majoritaires de la Cour suprême ont par conséquent conclu que l’abolition des récusations péremptoires était constitutionnelle.
Les modifications abolissant les récusations péremptoires sont applicables depuis le 19 septembre 2019
Les juges de la majorité ont statué que les modifications s’appliquent à toutes les procédures de sélection des jurés entreprises depuis le 19 septembre 2019. Ils ont expliqué qu’une modification de nature procédurale qui influe sur la façon dont un droit est exercé peut être appliquée immédiatement.
En conséquence, la Cour suprême a rétabli la déclaration de culpabilité prononcée contre M. Chouhan.
La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.
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