La cause en bref
Dow Chemical Canada ULC c. Canada
- La décision
- Date : le 28 juin 2024
- Référence neutre : 2024 CSC 23
- Décompte de la décision :
- Majorité : le juge Kasirer a rejeté l’appel (avec l’accord des juges Martin, Jamal et O’Bonsawin)
- Motifs dissidents : la juge Côté aurait accueilli l’appel (avec l’accord des juges Karakatsanis et Rowe)
- En appel de la Cour d’appel fédérale
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La Cour suprême confirme que la contestation par une contribuable d’une décision discrétionnaire de la ministre du Revenu national devait être soumise à la Cour fédérale.
Cet appel portait sur la question de savoir si la Cour canadienne de l’impôt avait compétence pour examiner la contestation par une société d’une décision de la ministre du Revenu national. La Ministre a refusé de réduire le revenu imposable de la société en rajustant la valeur d’une opération « avec lien de dépendance » que cette dernière avait conclue avec un prêteur étranger. Un tel rajustement est appelé un redressement à la baisse du prix de transfert.
Une opération « avec lien de dépendance » est une opération que concluent deux parties qui ne sont pas indépendantes l’une de l’autre. De telles opérations peuvent également être conclues par des personnes, des sociétés de personnes ou des sociétés non liées, selon les circonstances. Par contraste, une opération sans lien de dépendance est une transaction où chaque partie agit en fonction de ses propres intérêts. En contexte fiscal, la distinction est importante, car lorsque l’agence du revenu évalue une opération entre deux sociétés ayant un lien de dépendance (c’est-à-dire qui sont associées d’une certaine façon), elle veut s’assurer qu’elle va néanmoins percevoir l’impôt selon de la juste valeur marchande de cette opération.
La société canadienne en question, Dow Chemical Canada ULC, a conclu une convention de prêt comportant un lien de dépendance dans le but d’emprunter de l’argent à une société suisse à laquelle elle était liée. Par suite de cette convention de prêt, Dow Chemical a déboursé des frais d’intérêts pour ses années d’imposition 2006 et 2007. Elle a également déclaré pour l’année d’imposition 2006 un revenu à l’égard de services de fabrication fournis à la société suisse.
À la suite d’une vérification des opérations conclues entre Dow et la société suisse, la Ministre a établi une nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 2006 en appliquant les règles en matière de prix de transfert énoncées au paragraphe 247(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu (« LIR »). Lorsqu’un contribuable traite avec un non‑résident avec lequel il a un lien de dépendance – dans l’affaire en question la société suisse –, le paragraphe 247(2) de la LIR prévoit le redressement des montants d’une opération donnée afin qu’ils correspondent à ceux dont auraient convenu des personnes qui n’auraient pas de lien de dépendance. L’application du paragraphe 247(2) a entraîné une augmentation substantielle du revenu de Dow pour l’année d’imposition 2006, ce qui signifiait qu’elle allait devoir payer plus d’impôt.
Dow estimait que son revenu devait être revu à la baisse. Lorsqu’on identifie un montant qui aurait pour effet de réduire le revenu du contribuable, le paragraphe 247(10) de la LIR précise qu’un redressement à la baisse ne peut être effectué que s’il est approuvé par le ministre. Dow a demandé à la Ministre d’autoriser un redressement à la baisse du prix de transfert, mais celle-ci a exercé son pouvoir discrétionnaire et refusé la demande.
Dow a ensuite demandé à la Cour fédérale de réviser la décision de la Ministre. Ce processus s’appelle un « contrôle judiciaire ». Dow s’est également opposée à l’avis de nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 2006, puis elle a ultimement interjeté appel de la nouvelle cotisation à la Cour de l’impôt.
L’appel de Dow soulevait la question de savoir si la décision de la Ministre de refuser la demande de redressement à la baisse du prix de transfert échappait à la compétence exclusive conférée à la Cour de l’impôt. Selon cette dernière, la décision discrétionnaire que prend le ministre en vertu du paragraphe 247(10) est un élément essentiel de la cotisation du contribuable et concerne le bien-fondé de cette cotisation, et elle peut donc être contrôlée par la Cour de l’impôt en vertu de sa compétence exclusive, en appel, à l’égard du bien-fondé des cotisations. La Ministre n’était pas de cet avis et elle a interjeté appel à la Cour d’appel fédérale.
La Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel de la Ministre et a conclu que la Cour fédérale a compétence exclusive pour effectuer le contrôle judiciaire des décisions discrétionnaires prises par le ministre en vertu du paragraphe 247(10). Dow a interjeté appel à la Cour suprême du Canada.
La Cour suprême a rejeté l’appel.
La Cour de l’impôt n’avait pas compétence pour contrôler la décision discrétionnaire de la Ministre.
Rédigeant les motifs de jugement de la majorité, le juge Kasirer a conclu que lorsque le ministre exerce son pouvoir discrétionnaire en application du paragraphe 247(10) de la LIR pour refuser la demande présentée par un contribuable en vue d’obtenir un redressement à la baisse du prix de transfert, cette décision échappe à la compétence de la Cour de l’impôt à l’égard d’un appel de la cotisation du contribuable. La décision discrétionnaire du ministre ne fait pas partie de la cotisation. Le sens du mot « cotisation » est établi en droit, et l’opinion formulée par le ministre en application du paragraphe 247(10) se distingue de ce concept sur le plan qualitatif. Comme il n’existe pas de droit exprès d’appel à la Cour de l’impôt, l’instance où il convient de contester la décision discrétionnaire prise par le ministre en vertu du paragraphe 247(10) est la Cour fédérale, conformément à la compétence exclusive en matière de contrôle judiciaire qui lui est conférée par le paragraphe 18(1) de la Loi sur les Cours fédérales. Seule la Cour fédérale a compétence pour appliquer la bonne norme de contrôle et offrir l’éventail approprié de réparations en droit administratif.
La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.
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