La cause en bref

R. c. Archambault

La Cour suprême confirme que les nouvelles restrictions sur l’accès aux enquêtes préliminaires ne s’appliquent pas à certaines procédures criminelles en cours.

Cet appel portait sur l’interprétation d’une nouvelle règle qui limite les personnes ayant droit à une enquête préliminaire dans le cadre de leurs procédures criminelles. Une enquête préliminaire est une audience qui se déroule devant un tribunal et qui vise à déterminer si la preuve contre une personne accusée est suffisante pour justifier la tenue d’un procès.

Dans des affaires non liées, Agénor Archambault et Gilles Grenier ont été accusés d’une ou de plusieurs infractions d’ordre sexuel historiques contre un enfant. Postérieurement aux dates des infractions alléguées et avant que des accusations ne soient portées en 2019, la peine maximale pour la conduite reprochée est passée de 10 à 14 ans d’emprisonnement. Comme c’est le droit en vigueur au moment des crimes allégués qui régit la peine maximale applicable, dans le cas de M. Archambault ainsi que dans celui de M. Grenier la peine maximale est de 10 ans, et non de 14 ans.

En 2020, MM. Archambault et Grenier ont chacun demandé la tenue d’une enquête préliminaire. Toutefois, une modification apportée à l’art. 535 du Code criminel, qui est entrée en vigueur le 19 septembre 2019, est venue restreindre l’accès aux enquêtes préliminaires aux personnes inculpées d’infractions passibles d’une peine maximale de 14 ans d’emprisonnement ou plus. Dans les deux affaires, la Couronne a soutenu que, selon la version modifiée de l’art. 535, le tribunal ne pouvait pas tenir une enquête préliminaire.

La Cour du Québec a statué que le nouvel art. 535 s’appliquait à MM. Archambault et Grenier et qu’elle n’avait pas compétence pour présider l’enquête préliminaire. Ces derniers ont tous deux contesté sans succès cette interprétation devant la Cour supérieure. Ils ont plaidé qu’ils avaient droit à une enquête préliminaire parce que la nouvelle règle prévue à l’art. 535 ne s’appliquait pas à leurs procédures. Ils ont également soutenu que même suivant la nouvelle règle, ils avaient néanmoins droit à une enquête préliminaire. Selon eux, leurs infractions devraient être considérées comme étant passibles d’un emprisonnement de 14 ans ou plus pour l’application de la nouvelle règle.

La Cour d’appel a accueilli leurs appels subséquents et renvoyé les affaires à la Cour du Québec pour la tenue d’enquêtes préliminaires. La Cour d’appel a conclu que la version modifiée de l’art. 535 ne s’appliquait pas à MM. Archambault et Grenier. Ceux-ci avaient droit à la tenue d’enquêtes préliminaires avant la modification de l’art. 535. La Cour d’appel a jugé que le droit à une enquête préliminaire est basé sur la date de l’infraction reprochée. Vu sa conclusion, la Cour d’appel ne s’est pas penchée sur la question de l’interprétation de la version modifiée de l’art. 535.

La Couronne a interjeté appel à la Cour suprême du Canada, faisant valoir que MM. Archambault et Grenier n’avaient pas droit à une enquête préliminaire. La Cour suprême a rejeté l’appel.

Une enquête préliminaire peut avoir lieu lorsque la personne accusée est réellement passible d’une peine d’emprisonnement maximale d’au moins 14 ans, ainsi que sur une base transitoire dans certains autres cas.

Une majorité de juges de la Cour a conclu que MM. Archambault et Grenier avaient tous deux droit aux enquêtes préliminaires qu’ils avaient demandées. L’ancienne version de l’art. 535 continuait de s’appliquer à eux malgré la nouvelle règle. Le fait qu’ils n’avaient pas demandé d’enquêtes préliminaires avant le changement apporté à la loi n’était pas déterminant quant à leur droit à la tenue de telles enquêtes.

Une différente majorité de juges a conclu que ni M. Archambault ni M. Grenier n’avait droit à une enquête préliminaire en vertu de la nouvelle règle si celle-ci s’appliquait, étant donné que les infractions étaient chacune punissables d’un emprisonnement maximal de 10 ans. La nouvelle règle énoncée à l’art. 535 exige que la personne accusée soit effectivement passible d’un emprisonnement de 14 ans ou plus à l’égard de l’infraction dont elle est inculpée pour qu’une enquête préliminaire soit possible.

La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.