La cause en bref

Sanis Health Inc. c. Colombie-Britannique

La Cour suprême juge constitutionnelle la loi provinciale qui permet à la Colombie-Britannique d’intenter un recours collectif au nom de plusieurs gouvernements au Canada pour des préjudices causés par les opioïdes.

En 2018, la Colombie-Britannique a intenté une action en justice contre des compagnies pharmaceutiques qui fabriquent, commercialisent et distribuent des produits opioïdes partout au Canada. Elle a soutenu que chaque province et territoire au Canada connaît un nombre élevé de dépendances, de maladies et de décès liés à l’épidémie d’opioïdes, et que les compagnies défenderesses ont contribué à cette épidémie en présentant faussement leurs produits comme étant moins addictifs et moins susceptibles d’engendrer des problèmes de toxicomanie que d’autres médicaments contre la douleur. La province a demandé à la Cour suprême de la Colombie-Britannique de certifier l’action en justice en tant que recours collectif, afin qu’elle puisse agir à titre de représentante des demandeurs pour l’ensemble des gouvernements et organismes fédéraux, provinciaux et territoriaux ayant supporté le coût de soins de santé, de produits pharmaceutiques et de traitement liés aux opioïdes. L’article 11 de la loi intitulée Opioid Damages and Health Care Costs Recovery Act (« ORA ») autorise la Colombie-Britannique à intenter une action en justice au nom de plusieurs gouvernements, mais permet aux gouvernements qui le souhaitent de s’exclure de l’instance.

Plusieurs parties défenderesses ont présenté à la Cour suprême de la Colombie-Britannique des requêtes dans lesquelles elles plaidaient que l’article 11 de l’ORA était inconstitutionnel, parce qu’il excédait la compétence que possède le législateur provincial en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867. Elles ont soutenu que cet article ne respecte pas les limites territoriales du pouvoir de légiférer de la Colombie-Britannique et qu’il porte atteinte à la souveraineté des autres gouvernements du Canada. Le tribunal a rejeté les requêtes. Il a conclu que l’article 11 de l’ORA est un mécanisme purement procédural qui permet à la Colombie-Britannique d’agir pour le compte d’autres gouvernements dans le cadre d’une instance concernant des fautes en lien avec les opioïdes. Le tribunal a jugé que l’article 11 relève donc du pouvoir conféré par la Constitution à la province de légiférer sur l’administration de la justice dans la province. Il a également conclu que l’article 11 respecte les limites territoriales de la compétence de la Colombie-Britannique, puisqu’il ne touche les autres gouvernements que s’ils consentent à participer à l’instance.

Les parties défenderesses ont fait appel de la décision, plaidant que le juge qui avait entendu les requêtes avait eu tort de conclure que l’article 11 de l’ORA relève de la compétence législative de la Colombie-Britannique, étant donné que cet article influe sur les « droits civils substantiels » des autres provinces. La Cour d’appel a rejeté l’appel et a conclu, comme le juge des requêtes, que l’article 11 créait un mécanisme procédural. Les défenderesses ont interjeté appel à la Cour suprême du Canada.

La Cour suprême a rejeté l’appel.

La loi adoptée par la Colombie-Britannique traite de droits procéduraux et relève de la compétence de la province sur l’administration de la justice.

Rédigeant les motifs des juges majoritaires, la juge Karakatsanis a conclu que l’article 11 de l’ORA relève de la compétence législative de la province de la Colombie-Britannique. Les tribunaux inférieurs ont eu raison de conclure que, de par son caractère véritable, l’article 11 vise à créer un mécanisme procédural qui permet d’appliquer l’ORA à l’instance liée aux opioïdes déjà en cours. L’article 11 ne traite pas de droits substantiels, il a un lien significatif avec la province de la Colombie-Britannique, et il respecte la souveraineté législative des autres gouvernements au Canada. Il relève effectivement du paragraphe 92(14) de la Loi constitutionnelle de 1867, lequel confère aux provinces le pouvoir de légiférer sur l’administration de la justice dans la province. En vertu de ce chef de compétence, les provinces peuvent édicter des lois et prendre des règlements sur les tribunaux, les règles de procédure et la procédure civile. L’article 11 permet a priori à la Colombie-Britannique d’agir à titre de représentante des demandeurs pour un groupe comptant d’autres gouvernements au Canada qui choisissent de participer au recours collectif.

La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.